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Daniel C.

10,00
Conseillé par (Libraire)
1 mai 2020

À la date du 3 janvier 1939, dans "le salon de lecture" d' "Alger républicain", Albert Camus donnait la lecture suivante de la "Lettre aux paysans sur la pauvreté et la paix" de Jean Giono.

"Cette petite brochure de Giono s'adresse aux paysans et, par certains de ses accents, constitue un réquisitoire violent (mais non sans nostagie) contre l'ouvrier. On en jugerait mal cependant si on ne savait pas que, dans le dernier numéro des "Cahiers du Contadour", Giono est revenu sur sa position et a précisé que, devant les évènements de septembre 1938, désespérant de la classe ouvrière, il s'est adressé aux paysans comme au dernier espoir des hommes pacifiques.
Quoi qu'il en soit, et dégagée de l'actualité, cette "Lettre" ne s'oublie pas facilement. Giono s'est débarrassé, à ce propos, de tout lyrisme et privée de la surabondance poétique qui l'alourdit si souvent, sa phrase est ici rapide et nette. Si je puis dire elle est "parlante". On serait même tenté de croire, à la lire, que Giono est moins poète quon ne le croit et qu'à sa façon, il se rattache à cette lignée de prosateurs moralistes qui figure assez bien la tradition littéraire de la France. On en juge, du moins, au bon sens dévastateur et à l'impitoyable lucidité qui font le prix de cette "Lettre".
Mais, à lire ces pages éloquentes sur la pauvreté et la paix, cet appel passionné pour une vie paysanne mesurée, les pieds sur la terre, loin de l'argent et des spéculations d'État, on comprend mieux, toutes proportions gardées, ce que peut signifier le mot de prophète.
Jusqu'ici c'était un monsieur à la barbe qui disait des choses magnifiques et violentes dans une langue pas toujours comprise. Mais on prend conscience, devant cette "Lettre", que ce devait être un homme qui parlait à d'autres hommes le langage de leur coeur avec leurs mots de tous les jours.
Je ne sais pas si cette Révolution individuelle et non violente dont parle Giono est possible. Mais je sais qu'aucune n'est possible si elle n'a commencé dans le cœur et l'esprit de ceux qui comptent la faire. L'échec de tant de révolutions tient peut-être à cette idée. Cela suffit pour comprendre et aimer le message singulier de Giono. Il est quelque chose de plus qu'une actualité sans avenir."

Présenté par Alexandre Chollier, le texte est réédité joliment dans la collection "feuilles d'herbes" des Éditions Héros-Limite. La présentation est un peu courte, même si elle renvoie à une rapide bibliographie, et aurait mérité un peu plus de précisions. Le texte est contemporain de la crise des sudètes, et Giono lui-même, apporta immédiatement, suite aux évolutions de cette crise et son règlement par les accords de Munich quelques "Précisions". Tel est le nom du pamphlet publié par Grasset en janvier 1939 et, donc, pré-publié, dans la septième livraison des "Cahiers du Contadour" et vers lesquels nous renvoie Camus dans sa lecture. Je vous y renvoie aussi, par ailleurs, dans la Pléiade. En attendant une réédition critique plus complète, la "Lettre" s'appréciera par delà le temps et les époques et comme conclut Alexandre Chollier, "Elle nous engage à questionner une société occidentales (et ses épigones) se pensant et se donnant en modèle unique, refusant de fait toute contestation ; même lorsque la survie des populations paysannes d'ici ou d'ailleurs - et donc par là-même la sienne propre - est en jeu."

9,00
Conseillé par (Libraire)
1 mai 2020

De temps en temps un éditeur édite à nouveau un titre de Beppe Fenoglio et c'est à chaque fois un évènement. Après la Paie du samedi repris en Imaginaire chez Gallimard, il y a quelques années, Cambourakis sort Le mauvais sort paru à l'origine en 1988 chez Denoël. L'écriture est sobre et implacable, le récit magistral. Agostino, est un cadet pauvre des Langhe, des collines piémontaises qui surplombent la côte ligure. Il est placé chez un métayer d'un pharmacien de la ville d'Alba. Esclave d'un esclave, pour 7 marenghi, que le métayer paiera chaque année au père. De cette place Agostino découvrira le monde, se forgera une pensée, un monde et une pensée soumis au mauvais sort réservé aux pauvres travailleurs. Cambourakis fait partie des éditeurs qui comme Finitude, Le Dilettante, L'Arbre Vengeur ou Attila savent éditer sans tenir compte de l'air du temps, les textes oubliés nécessaires à notre temps. Un rôle essentiel à côté des mastodontes de l'édition pris dans le drame de la surproduction.

22,00
Conseillé par (Libraire)
1 mai 2020

Geneaologie.

Alexis Guiton, un jardinier, se maria avec Magdeleine Penas le 8 décembre 1619 à Marseille. Il eut une fille, prénommée Magdeleine comme sa mère. Celle-ci se maria une première fois le 4 janvier 1644, aussi à Marseille, avec un dénommé Antoine Barthelemy qui mourut assez vite puisque elle se remaria 3 ans plus tard, toujours à Marseille, le 2 juin 1647, avec un certain Alexis Rose. Mais ils eurent le temps d'avoir une fille, Claire, qui, en se mariant, encore à Marseille, le 30 juin 1674, avec Antoine Bellon, donna naissance à un fils appelé Joseph. Joseph, marié encore et toujours à Marseille, lors de la triste année 1709, le 15 octobre, avec Magdeleine Mourard, eut une petite Rose qui, à 20 ans, le 3 septembre 1747, dans la ville de ses ancêtres, épousa Joseph Granier. Des époux Granier naquit une fille, Magdelene, qui mourut à Marseille à l'âge de 45 ans le 10 février 1809, non sans avoir eu le temps de se marier avec François Laurent Rostand et d'enfanter une autre fille, Marie Rose. Magdelene vécut suffisamment longtemps, ou bien est-ce Marie-Rose qui se maria bien assez tôt, à 18 ans, pour assister à ce mariage, dans cette même ville, le 26 octobre 1803, avec Jerôme Beleoud. L'année où mourut sa grand-mère, Magdelene, naissait, le 18 novembre, Thérèse Marie Beleoud, mariée sur le tard, à presque 30 ans, à Claude Camus, le 11 mai 1839, à Marseille, porte de l'Orient. Leur fils Jean-Baptiste (Jules Marius) prit la mer et se maria de l'autre côté de la méditerranée le 30 décembre 1873 à Ouled Fayet en Algérie avec Marie Hortense Cormery. Un fils naquit de cette union, Lucien Auguste, qui ne passa pas la guerre (Grande), mort qu'il fut, après avoir été zouave, le 11 octobre 1914, à l'hôpital militaire de Saint-Brieuc, en métropole. Mais un an avant, le 7 novembre 1913, était né, de son mariage avec Catherine Sintes, un petit Albert.

Albert Camus écrivit L'étranger.

Albert mourut sur une route en direction du nord de la France le 4 janvier 1960. Il s'était marié deux fois.

Si nous sommes tous cousins, Jacques Ferrandez est cousin d'Albert Camus. Un cousin de cœur du moins. Rendu par l'Algérie à Nice, il est né à la BD en donnant des nouvelles de l'arrière-pays niçois, puis, à travers la série Carnets d'orient, il a raconté, en 10 albums, l'Algérie coloniale. Aujourd'hui, il entreprend d'adapter les œuvres de son prestigieux compatriote, Albert Camus. Pour les cinquante ans de sa mort, en 2010, Gallimard-Futoropolis a publié une première adaptation L'hôte. Cette année, centième anniversaire de sa naissance, Gallimard-Futuropolis publie L'étranger. La famille Gallimard devait bien ça à la mémoire d'Albert Camus. Bien que l'assassinat intellectuel soit monnaie courante dans le milieu de l'édition, il est rare qu'un éditeur commandite une opération kamikaze à l'encontre d'un de ses auteurs.

Le travail de Ferrandez est remarquable.

Conseillé par (Libraire)
1 mai 2020

Durant le premier tiers du XIXe siècle ce sont près de 30 000 enfants qui sont admis chaque année dans les services d'assistance et ils sont 6947 recueillis dans les hospices des Basses-Alpes entre 1809 et 1834. Le décret napoléonien de 1811 « concernant les enfants trouvés ou abandonnés et les orphelins pauvres » tente d'organiser l'accueil des nourrissons au niveau des départements.
La lecture fine des archives, des registres des hospices du département, surtout ceux de Manosque, Digne et Sisteron par Isabelle Grenut fait renaître ces destins de vie souvent éphémères, décrit la difficulté et le désarroi que rencontre l'administration face à l'augmentation spectaculaire des abandons d'enfants, mais surtout essaye de comprendre ce phénomène social qui implique les différents aspects de l'évolution de la société française, mais aussi fait naître une véritable politique de protection de l'enfance.

Conseillé par (Libraire)
1 mai 2020

Ni mémoire d’enfance, ni manuel pédagogique, le beau récit d’Agnès DESARTHE « Comment j’ai appris à lire », pourrait plutôt faire partie des écrits de résistance… Touchante histoire, non pas au sens de l’émotion qu’elle soulèverait mais au sens où elle nous percute : ne serions-nous pas de ces lecteurs qui nous laissons envahir par nos lectures, consommateurs de livres comme d’autres produits qu’on saurait, à grands coups de prix littéraires (ou de convenances sociales), nous faire acheter et lire ?
C’est au contraire, sa peur d’être envahie par quelque chose d’extérieur à soi, un texte perçu comme une menace, une intrusion insupportable (fut-ce un grand texte comme Flaubert ou Proust !) qui, pendant plus de dix ans, dissuade Agnès Desarthe de lire quoi que ce soit, alors qu’elle écrit depuis l’âge de sept/huit ans. Et de nous narrer avec humour les acrobaties auxquelles ce rejet instinctif la contraint, non seulement au lycée mais jusque dans les classes préparatoires à Normal’Sup… pour enfin nous faire découvrir avec elle, en fouillant dans son histoire familiale, la clé de cet étrange malaise… qu’on ne dévoilera pas ici !
Les rencontres avec plusieurs femmes (toutes des Mmes B...) vont finalement avoir raison de ce qui l’aurait finalement aussi privée d’écriture. Et puis un renversement s’opère, lorsque Agnès Desarthe se lance dans la traduction. On a là quelques pages aussi fines que superbes sur ce métier, intitulées « quand traduire, c’est dé-lire », où, en place de l’invasion intrusive d’un texte, a fortiori dans une langue étrangère, surgit la possibilité d’une collaboration intime entre auteure et traductrice, allant jusqu’à des modifications textuelles pour respecter l’esprit et le génie de la langue « à faire passer au tamis ». Mais alors se lève en miroir, l’autre question : pourquoi écrit-on ? L’amorce de réponse dans le dernier chapitre, laisse espérer qu’Agnès Desarthe nous régalera un jour d’un autre récit sur le sujet…

François Longchamp